AG des actionnaires d’Orange 2023 : les questions écrites de la CFE-CGC Orange et de l’ADEAS

par Hélène Marcy le 11/05/2023

Catégories: L'action de l'ADEAS | Tags: , | Permalink | Commentaires fermés sur AG des actionnaires d’Orange 2023 : les questions écrites de la CFE-CGC Orange et de l’ADEAS

Si vous détenez des actions au nominatif pur, ou au porteur, vous pouvez adresser vos questions écrites à l’adresse assemblee.generale@orange.com, au plus tard 4 jours ouvrés avant la date de l’Assemblée générale, soit cette année le 16 mai. Pour les actions au porteur, votre courriel doit être systématiquement accompagné d’une attestation de participation à l’Assemblée générale fournie par votre intermédiaire financier. Pour les actions détenues au nominatif pur, vous êtes connus dans les livres de l’entreprise et vous n’avez pas besoin d’attestation. Si vous envoyez vos questions au delà de la date limite, elles seront traitées comme des questions orales : il y sera répondu pendant l’Assemblée générale « sur la base d’une sélection représentative des thèmes ayant retenu l’attention des actionnaires, dans la limite du temps imparti » .

Voici les questions écrites de la CFE-CGC Orange et de l’ADEAS. Les réponses seont publiées sur le site institutionnel d’Orange dès le jour de l’AG. En voici la restitution.

Responsabilité sociale et environnementale

Le plan stratégique “Lead the future” présenté le 16 février dernier affiche parmi ses objectifs clefs : “Intégrer les enjeux environnementaux dans nos activités, pour être performants dans la durée et résilients”.

Cependant, bien que les entreprises soient tenues de le publier au moins tous les 4 ans sur le site de l’Ademe, Orange n’a pas actualisé la publication de son bilan GES : le dernier publié, très incomplet, est basé sur les données 2015, et ne comporte aucune donnée ni plan d’action sur le scope 3, qui constitue pourtant le plus émetteur, et sur lequel l’entreprise indique par ailleurs vouloir faire des efforts particuliers.

1.    Quand ce bilan sera-t-il actualisé ?

2.    Quel plan d’action est prévu par Orange, notamment sur le scope 3 ?

3.    Où ces informations sont-elles publiées pour partage tant avec les personnels qu’avec les actionnaires d’Orange ?

4.    Le Conseil d’administration d’Orange envisage-t-il de présenter une résolution permettant aux actionnaires de s’exprimer sur la stratégie climat de l’entreprise (« say on climate »), avec un scénario crédible visant à limiter le réchauffement à 1,5°C et permettant d’apprécier les progrès accomplis chaque année ?  Si oui, quand ?

Gouvernance 

Depuis le 4 avril 2022, la gouvernance d’Orange est dissociée, avec un Président du Conseil d’administration et une Directrice Générale. Dans ce cas, le code Afep-Medef recommande que les missions confiées au Président du conseil en sus de celles conférées par la loi soient décrites dans le règlement du Conseil d’administration. Or, le rôle du Président reste généraliste et flou dans l’actuel règlement du Conseil d’administration d’Orange.

5.    Quelle est la description détaillée des missions du Président ?

6.    Comment l’indépendance opérationnelle de la Directrice générale est-elle assurée ?

7.    Comment expliquer que ce soit le DRH qui réponde à un courrier expressément adressé au Président du Conseil d’administration concernant l’intéressement supplémentaire, dont la décision est une prérogative exclusive du Conseil d’administration, avant que la réunion du Conseil susceptible de trancher cette question ait eu lieu ?

8.    Pourquoi avoir supprimé le comité Innovation & Technologie des comités inhérents au Conseil d’Administration pour le remplacer par le Comité Stratégie ? Doit-on en conclure qu’Orange n’entend plus innover dans son domaine d’activité ?

Souveraineté numérique et influence de l’Etat français sur la stratégie d’Orange

Les télécommunications sont reconnues comme un élément clef de la souveraineté d’un pays. L’Etat français détient près de 23% du capital d’Orange, et près de 30% des droits de vote en AG.

9.    L’Etat impose-t-il à Orange de concourir à la souveraineté numérique de la France ? Si oui, en quoi ?

10.  Les demandes de l’Etat sont-elles plus prégnantes sur les questions de couverture du territoire par les réseaux de télécommunications, de sécurité du réseau et des données qui transitent dessus… ou sur le versement d’un dividende significatif pour alimenter ses caisses ?

11.  Cela complexifie-t-il la définition de la stratégie d’Orange ?

Identification des intérêts économiques du Groupe

Le DEU ne permet pas d’identifier clairement tous les détenteurs d’intérêts économiques au sein du Groupe Orange, et quelle part de la valeur produite récupèrent ces différents détenteurs d’intérêts économiques.

12.  Quelle est la liste des filiales non détenues à 100% par Orange ? Pour chacune de ces filiales, quelle est sa valorisation, la liste des investisseurs et la part de capital qu’ils détiennent, ainsi que les dividendes qu’ils perçoivent au titre de ces participations ?

Facturations intra-groupe

L’utilisation de la marque Orange (logée au Royaume Uni) par Orange Business fait l’objet d’une facturation interne.

13.  Pour quel % du chiffre d’affaires et quel montant global en € pour 2022, respectivement pour la division SCE et l’UES OBS ?

Sous-traitance et qualité de service

Le niveau de sous-traitance en France (maison mère et filiales) ne cesse d’augmenter. Fin 2021, on atteint un effectif de 32 220 équivalents temps plein pour un budget de 3 Mds€. Sur les 12 dernières années, le taux de sous-traitance en France est passé de 20% à 30% de la force au travail, laquelle a globalement nettement moins diminué que les effectifs internes.

La stratégie « Lead The Future » recentre l’activité du Groupe, avec notamment pour mot d’ordre « Valoriser notre cœur de métier, pour renforcer notre excellence et notre qualité de service ».

Cependant, l’excellence et la qualité de service reposent essentiellement sur les compétences, la formation, l’engagement des personnels, et la qualité de l’organisation du travail et des processus au sein de l’entreprise. Ces éléments sont particulièrement difficiles à maîtriser auprès d’une force de travail externe, comme le rappellent notamment cet article des Échos sur le « dogme des entreprises sans usine » , mais aussi les polémiques sur les « plats de nouilles » dans le déploiement de la Fibre, que le Sénat français envisage d’encadrer plus sévèrement.

14.  Quelle est la justification d’un tel niveau de sous-traitance ? Quels avantages précis y voit la Direction de l’entreprise par rapport à une force au travail interne ? 

15.  Comment la Direction peut-elle nous démontrer que le renforcement de l’excellence est compatible avec une croissance de la sous-traitance et de l’offshoring ? Pouvez-vous nous donner des exemples concrets d’entreprises qui aient amélioré leur excellence opérationnelle (en termes de qualité des prestations fournies) en augmentant leur niveau de sous-traitance ? 

16.  La direction d’Orange envisage-t-elle, après « les entreprises sans usine » décrétées en 2001 par le patron d’Alcatel, avec les conséquences que l’on connaît pour cet ancien fleuron français, de mettre en oeuvre une société de service sans personnel interne ?

17.  Sachant qu’une partie croissante des activités du Groupe, notamment dans les équipes de la division Innovation, sont de plus en plus sous-traités dans des pays socialement moins-disants (Europe de l’Est, Afrique du Nord, Inde), en quoi ces niveaux de délocalisation sont-ils compatibles avec la responsabilité sociale d’Orange ? Comment la Direction justifie-t-elle la mise en concurrence des travailleurs du monde entier, au détriment de l’emploi direct en France, pays d’origine du Groupe et d’implantation de son Siège Social ?

L’emploi interne pâtit du développement de la sous-traitance

Le développement de la sous-traitance entraîne une baisse drastique de l’emploi interne, tout particulièrement en France. Entre 1998 – date de libéralisation du secteur – et 2021, l’emploi direct chez les opérateurs est passé de 156 000 à 98 000 emplois en France. L’essentiel des suppressions d’emplois a été réalisé chez Orange, qui dans la même période, est passé de 155 000 emplois à 78 000, soit une division par deux en 23 ans.

À l’échelle du Groupe Orange, et après une série de coupes sombres en Pologne, c’est la France, et singulièrement la maison mère Orange SA, qui porte l’essentiel des destructions d’emplois : près de 30 000 en 12 ans.

Après la crise sociale (2006-2009), l’entreprise a mis en place 5 accords de « temps partiel seniors » (TPS), qui ont concerné, d’après les bilans sociaux d’Orange, près de 54 000 personnels français à 3 ans de la retraite entre 2010 et 2022. Soit 4 500 personnes par an en moyenne, dont 7 600 en 2022, selon les estimations qui circulent dans la presse, la Direction de l’entreprise n’ayant pas encore communiqué le bilan officiel global aux représentants du personnel.

18.  Quel est le total des TPS et TPA signés en 2022 ?

Depuis début 2022, avant même la présentation de son nouveau plan stratégique, la nouvelle Direction d’Orange a démultiplié le rythme et l’ampleur des réorganisations dans différentes entités du Groupe.

La transformation du réseau de distribution d’Orange en France est l’une des plus spectaculaires. La moitié des boutiques Orange détenues par la maison mère vont passer sous le contrôle de sa filiale Générale de Téléphone d’ici 2026, impactant entre 1 400 et 1 800 salariés. L’entreprise aurait pu opérer un transfert en s’appuyant sur l’Article L1224-1 du Code du travail, qui garantit aux salariés le maintien de leur contrat de travail dans la nouvelle entité juridique. Elle n’en fait rien, proposant à la place un reclassement au sein d’Orange SA (notamment … dans des boutiques dont la fermeture est probable sous moins de deux ans).

19.  Ne s’agit-il pas d’un plan social déguisé, visant à encourager un nombre significatif de salariés à « jeter l’éponge » et à quitter le Groupe ? Combien de postes la Direction envisage-t-elle d’économiser au travers de ce projet ?

En 2022, la division Innovation a connu une nième réorganisation, qui a eu pour effet le plus visible l’entrée de près de 500 personnes dans le dispositif de Temps Partiel Seniors, et plus de 40 démissions (pour environ 15 habituellement) : du jamais vu dans cette unité, dont un nombre croissant d’activités est délocalisé dans des pays à faible coût salarial.

En 2023, après 120 suppressions de postes en Europe (hors France) courant 2022, la Direction veut mettre en place d’un plan de rupture conventionnelle collective (RCC) pour près de 700 salariés du périmètre Orange Business au sein de la maison mère.

D’évidence, le Groupe Orange est en train d’opérer une restructuration d’ampleur, ce qui soulève plusieurs questions :

20.  Combien d’emplois internes le Groupe prévoit-il de supprimer en France dans les 3 prochaines années ?

21.  Quel est l’objectif à atteindre en termes d’effectifs de la maison mère et des filiales en France à l’échéance du plan « Lead The Future » (2025) ? Sur quelle base factuelle cet objectif est-il calculé ? Pour servir quel objectif ?

22.  Quels sont les plans de suppression d’emplois en cours hors de France ? Merci de préciser les pays concernés, le nombre d’emplois concernés, les activités concernées, et les motivations des suppressions prévues.

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